Désert de Guerre ― L'Arrivée

Chronologie des Donjons

1- Désert de Guerre

Ça ne devait faire que quelques jours que Kathryn était sortie de l'hôpital. Quelques jours qu'elle avait fait face à un événement ayant laissé une multitude de séquelles, mais surtout de questionnement. Si la simple idée de pénétrer au coeur d'un portail la rendait nerveuse, elle n'avait pourtant pas pris sa retraite. Depuis cet étrange événement, des bulles dignes d'un jeu vidéo apparaissaient ici et là et en fonction de ses commandes vocales. Si elle venait de passer les quelques derniers jours à essayer de comprendre tout ce que ça impliquait, elle n'était vraiment parvenue qu'à identifier quelques mots clés pour faire apparaître quelques informations ici et là.

Elle avait reçu, un peu plus tôt, un texto l'invitant à prendre part à une petite équipe d'une dizaine de personnes chargées d'explorer les confins d'un donjon qui était apparu en milieu rural. Gigantesque portail bleuté, une faible quantité d'énergie émanait de ce dernier, au beau milieu d'un champ en Allemagne. Les donjons de ce niveau ne représentaient pas un danger bien particulier, pourtant, chaque un des pas qui la menait en direction de son objectif semblait plus lourd, plus intransigeant.

Arrivant près d'une partie de l'équipe qu'elle accompagnerait, ses pupilles céruléennes valsaient sur les différentes têtes attendant l'arrivée de tous. Les toisant du regard, elle ne voyait ici personne qu'elle avait d'ores et déjà rencontré. Elle n'en était pas à ses premiers donjons, loin de là, mais elle ne pouvait chasser sa dernière expérience de son esprit.

Comptant ses différents partenaires, ils étaient six incluant elle. Elle n'était pas la première arrivée, elle n'était pas la dernière. Ne sachant pas trop combien de temps elle allait devoir attendre, elle retirait de sur son dos le sac contenant son équipement. Elle avait joué un peu avec « inventory », la commande qui ouvrait un inventaire permettant d'y ranger un grand nombre d'objets, mais avait décidé de garder tout ça secret. Afin de ne pas avoir recours à quelque chose sortant de l'ordinaire, la pugiliste avait décidé de jouer le jeu et de transporter elle-même ses objets, comme elle le faisait avant. Une multitude de rations, un peu d'eau, quelques bandages et une pioche bien ordinaire. Voilà les objets qui l'accompagneraient au coeur de cette aventure. Elle n'avait pas besoin d'arme, ses propres poings suffiraient à cette spécialiste des arts martiaux.

Arrivant au niveau de ses équipiers, elle déposait au sol son sac. L'Américaine saluait ceux et celles qui daignaient lui porter une attention quelconque. Entamant quelques conversations bien inutiles pour passer le temps, elle rigolait à quelques blagues ici et là. Elle n'eut pas très longtemps à attendre avant l'arrivée de la totalité du groupe. De par la configuration des lieux, elle avait eu la chance de les voir arriver de loin.

D'une douce voix, un peu stressée, elle avait accueilli chacun des membres restant à l'aide d'un geste de la main.

[Kathryn] -  Ravis de faire votre connaissance ! Je m'appelle Kathryn !

Leur avait-elle dit, poliment.

[Kathryn] -  En espérant que ce donjon nous soit tous profitable !

Avait-elle rajouté, le sourire aux lèvres.

J’avais curieusement connue des retours au pays dans de meilleures conditions. Je ne sais pas… Cela faisait pourtant des mois que je n’avais pas pris ce fameux train, le direct entre Paris et Munich, et pourtant, la moindre colline me semblait être terriblement familière. J’en étais pas à prédire quand il y aurait une petite bosse sur les rails qui ferait que ma tête, posée contre la vitre, vibrerait encore plus au point de me faire mal sur la réception, mais je commençais à m’en approchée.

Mais pour être honnête, y’avait pas mal de choses qui me travaillaient actuellement. Vraiment tout un paquet, au point où j’avais besoin de faire comme un road-trip sur mes terres natales. Et ça faisait assez bizarre de revoir l’immeuble où j’avais grandie, toujours là, toujours debout malgré les années et les donjons. Évidemment, il y avait l’appart que mon père et moi occupions à l’époque, mais maintenant, il n’y avait rien de plus qu’un nom que je connaissais que très peu. La nouvelle famille, à qui l’agence à laquelle j’avais confiée la vente avait cédé le bien contre une bonne somme. Ça m’faisait encore un peu mal au cœur, surtout là, mais c’était pour le mieux après tout.

Cependant, si j’étais là, ce n’était pas seulement pour regarder avec nostalgie une fenêtre aux rideaux fermés. A une trentaine de kilomètres de là, proche d’une ferme aux champs qui s’étendaient à l’horizon, un donjon était apparu. De base, rien d’exceptionnel. Il devait y en avoir des dizaines qui s’ouvraient chaque heure ici et là dans le monde, si ce n’était plus. Non, le détail qui faisait tout, c’était que j’y étais inscrite.

Ouaiiiis, ça avait pas été spécialement l’idée du siècle, et l’instant d’après où j’avais signée numériquement, je m’étais demandée dans quelle connerie je m’étais embarquée… Mais en ce moment, j’étais sûre de rien si je devais être honnête. Entre Rio et Tokyo, j’avais eu mon lot de certitude qui avaient sautés, accompagné d’une sorte de mal-être. C’était… C’était comme si l’enfant que j’avais toujours été s’était prise la claque de sa vie. Bienvenue à l’âge adulte, tu va roter du sang.

Est-ce que j’étais une adulte maintenant ? A l’âge ? Ouais, évidemment. A la maturité ? Ça, ça restait encore à prouver. J’avais encore bien des marches à gravir, et être capable d’entrer dans un donjon, de faire ce qu’on me demandait et d’en sortir vivante me semblait être une base. Suicidaire hein, je me lançais dans un défi complètement invraisemblable, mais… Bon hein, merde !

Puis y’avait d’autres raisons. Scarlet déjà. Vu ce qu’elle traversait, vu comment elle semblait être complètement paumée, il allait falloir que j’essaye d’en apprendre plus. Peut-être qu’elle n’était pas un cas si isolé en fin de compte ? Pour le moment, je n’étais pas capable de trouver la moindre information, mais peut-être qu’en me rendant directement sur le terrain, j’allais peut-être en apprendre un peu plus, ou me rendre compte de ce genre d’histoire.

Bref, le moment d’aller de l’avant.

Ce fut ainsi que je me retrouvais en pleine campagne. Mes chaussures étaient pleines de terres, et chaque pas me faisait enfoncer un peu plus dedans. Ouais, j’étais pas vraiment une paysanne, plus une citadine confirmée qui se retrouvait dans un environnement hostile. Et je n’étais même pas encore entrée dans le donjon. Mais bon, déjà il fallait que je salue mon nouveau groupe !  Et quitte à être sur mes terres, autant le faire dans la langue locale !

“Salut ! Hey, à l’heure, j’aurais pas crû que les embouteillages à la sortie de Munich allaient être aussi chiants.”

Si certains se gaussèrent un peu face à moi, la petite adulte aux paroles un poil trop sympathiques, d’autres me dévisagèrent comme si je venais d’invoquer Satan. Ou Lucifer. Enfin, pas celui que je connaissais, plutôt… Et puis zut !

“Oh pardon, My bad !” Repris-je en Anglais. “Je disais juste que j’ai du bol d’être à l’heure, à cause des embouteillages. Et pourtant j’essayais d’être prudente dessus !”

Face à ça, un des mecs assis sur une pierre se leva, et… Cacha complètement le soleil tant il était grand. Il devait au moins faire deux mètres ! De large ! Peut-être pas, mais clairement, c’était un colosse.

“Oh putain vous êtes grand !”

Je reculais un peu, histoire de pas me bloquer le cou tant j’allais devoir pencher la tête pour le regarder. La faute à ma taille qui n’arrivait même pas proche du mètre soixante. Sauf qu’à force de reculer, l’arrière de ma tête touchais quelqu’un, ou plutôt, vu ma taille, le torse de la dite personne.

“Oups !” Fis-je en me retournant, pour tomber sur une grande blonde qui ne semblait pas être là pour plaisanter ! Regard sérieux, acéré, prête à se jeter telle une aigle sur sa proie. Tant que c’était pas moi, ça m’allait. “Désolé, vous êtes juste sacrément grands ici !”

Fallait croire que ma taille était un désavantage. Mais bon, heureusement, je n’allais pas frapper ces choses à la seule force de mes poings. fallait que j’me présente du coup.

“Bon, moi c’est Julia, mage. J’ai lu pas mal de choses sur les donjons, mais la pratique peine un peu.” Fis-je en me grattant un peu l’arrière de la tête. Une façon plus polie de dire que c’était mon premier. “Mais bon, il va pas se faire en discutant devant ! On entre ?”

Désert de Guerre ― Beurk, Du Sable

Observant un peu à l'écart le reste de la multitude arrivée, Kathryn ne pouvait que se sentir exclu de la masse. Non pas parce que c'était le résultat de l'action des autres, mais bien parce qu'elle se sentait, elle-même, incompétente. Ses statistiques étaient une véritable farce et même un donjon du niveau qu'elle allait affronter lui poserait un problème conséquent. Comment pouvait-elle être aidante dans ce genre de situation ? Comment pouvait-elle être autre chose qu'un boulet qu'on traîne simplement parce qu'il faut être dix pour un donjon ?

Dans tous les cas, alors que le groupe s'apprêtait à pénétrer dans les terres inconnues derrière le portail, l'Américaine ne pouvait que nourrir le sentiment qu'elle n'était pas à sa place. Si, au fil des jours et des entraînements, ça allait finir par changer, en cet instant et en ce moment, ce n'était absolument pas le cas. Naturellement, la multitude se regroupait autour d'un colosse. Un homme à la taille impressionnante, même pour Kathryn qui n'était pas du tout petite. Le groupe semblait d'ores et déjà lui faire confiance et dans cette lignée, il obtenu le rôle de leader sans même avoir besoin de le stipuler ou de voter. Il dégageait une aura de confiance qui semblait regrouper les gens autour de lui. Une sorte de charisme naturelle.

Expliquant quelques détails sur la formation qu'il s'attendait et sur l'implication de tout un chacun, le groupe s'apprêtait rapidement a se mettre en action. Le colosse était un Tank, ce qui allait bien avec son apparence. Ce n'était pas toujours le cas, Kathryn avait vu des adolescentes frêle et fragile occuper ce même rôle, mais cette fois-ci, il n'y avait pas de doute. L'éveil venait vraiment avec le dicton : "L'habit ne fait pas le moine".

Il fut le premier à mettre les pieds dans le donjon, suivi de très près par le restant de la multitude. N'étant pas complètement à l'arrière, la pugiliste pénétrait dans le nouveau monde et posait son regard sur les plaines désertiques qui s'offrait à elle.

[Kathryn] -  Shit, on se croirait au texas. Répliquait-elle, par réflexe. Je déteste le sabre... ça se coince entre les orteils.

Se plaignait-elle sans réellement porter attention à ceux et celles qui étaient autour d'elle. La chaleur du soleil était limite suffocante, alors que la multitude venait tout juste d'entrer dans les terres hostiles du donjon. Des dunes de sable à perte de vue occupaient la majorité de l'endroit. Un monde ouvert avec une teinte carmin ici et là. Posant ses iris sur l'hémoglobine qui venait teinter le sable, elle ne pouvait qu'être méfiante de cet environnement qu'elle détestait déjà.

[Kathryn] -  Regardez... Au loin. On dirait des machines de guerre.

Dit-elle en pointant une carcasse à peine identifiable, au loin. Près d'elle, une magicienne dont la tête arrivait au niveau de la gorge de l'Américaine. Elle se rappelait quelques mots qu'elle avait prononcés aux groupes, en se présentant.

[Kathryn] -  Julia, c'est ça ? Lui demandait-elle avec un sourire. J'espère que tu as amené de l'eau. Rigolait-elle afin de détendre maladroitement l'atmosphère.

Rapidement, notre groupe fut complet, et rapidement, des personnes plus expérimentées que moi se chargèrent de prendre en main les opérations qu’il allait y avoir. Fiou, au moins, si j’évitais de me retrouver en haut de la chaine de commandement dès mon premier donjon, ça m’allait ! Puis bon, qui j’allais impressionner avec ma taille et ma petite voix fluette ? Probablement les deux-trois campagnols qui devaient être pas trop loin. Et à la limite un poney, s’il y en avait un.

Du coup, on eu le droit rapidement à un petit briefing, histoire de rappeler les règles de base. On se sépare pas, on fait attention, bla bla bla, ce genre de truc qui, j’en étais sûre, se disaient à chaque fois et pourtant une fois sur deux les bons principes étaient oubliés. A croire que ça servait plus à se donner bonne conscience en cas de problème que de réellement sauver des vies. Une sorte d’assurance en gros ? Peut-être… Mais bref, c’était le moment de passer le portail, pour arriver dans un autre monde !

Et quelle autre monde allions nous avoir dans la roulette du destin ? Un royaume rempli de champignons géants ? Un cimetière aussi sombre, sinistre que terrifiant ? Une jungle infernale où la moindre plante explosait ? Ou bien-

“‘Ai du chable dans ‘a ‘ouche !”

Crachant à plusieurs reprises par terre dans une sorte de réflexe défensif, la première sensation était pour le moment… Désagréable. Sans dec ? Punaise, c’était pas terrible comme premier contact. Je savais bien que les donjons voulaient pas spécialement notre bien, mais d’y aller directement et d’une manière aussi pernicieuse… Tain, j’en avais entre les dents maintenant… Tu parles d’un confort.

Donc ouais, du sable. Du sable à perte de vue. C’était un peu le problème du désert hein, c’était sa monotonie. Et avec ça se rajoutait un vent désagréable qui balançait du sable jusque dans nos chaussures et nos yeux. Bon, on partait clairement sur un moment désagréable sous un soleil de plomb. Je me retrouvais rapidement à sortir une serviette de mon sac (j’avais pris beaucoup de chose, espérant que l’une d’entre elle me serait utile, et d’avoir du tissu me semblait pas être la chose la plus déconnante qui soit) pour la nouer autour de ma tête. Je savais pas si c’était efficace, mais dans tous les films ils faisaient ça, donc à défaut, c’était qu’il y avait une raison non ?

Bon, j’étais avec mes petites affaires, et chacun allait de son petit commentaire. Tout ce que je savais, c’était que les réjouissances allaient attendre hein. Cependant, en regardant un peu plus en détail, il semblait que nous n’étions pas que dans le désert le plus paumé que cela pouvait être. Il y avait en effet par endroit des sortes de… Machine ? Enfin, plus des engins de siège, style catapulte et autre. Comme s’il y avait eu ici une bataille médiévale. Surtout qu’à ça se rajoutait des teintes de rouge et des formes dans le sable. Des cadavre ? Ouais, mais pas vraiment humain. Genre celui-là avait deux têtes. Des monstres pas forcément très familiers ni très accueillant.

“Well, on y est. Les deux pieds dedans même.”

Au moins c’était dit, et si j’eu un micro-soupir là, quelqu’un, la grande blonde du groupe, qui vint tenter de vérifier si j’avais mes prit quelques provisions. Vu mon sac, ouais, ça pouvait se comprendre. J’avais l’impression d’être Dora l’Exploratrice.

“Alors, plus du Red Bull que de l’eau. J’ai un peu dévalisée un rayon en venant, en pensant que ça pourrait être utile d’avoir un truc un peu énergisant, mais… Là avec le sucre, je suis pas certaine que c’était la meilleure idée. Au pire, ça fera du caramel.”

Il fallait bien improviser un peu, non ? C’était ce que je pensais, et du coup, je commençais à grimper la première dune, laissant bien des trâces sur le sable qui, à chacun de mes pas, semblait révéler des trâces sanguinolentes sur le sol. C’était vraiment zarb… Cependant, du haut de ma dune, j’allais pouvoir faire les premières explorations.

“On dirait qu’on est au début d’un charnier ! Y’a des… Truc, un peu partout. Mais y’a l’air d’avoir aussi des tour de siège et des avant-postes… Y’a peut-être aussi un gros truc au loin, genre… Une ville peut-être ? Difficile à dire.”

S’il y en avait une de toute façon, vu l’état de la région, ça devait être plus une ruine qu’autre chose. Enfin, ça pouvait être aussi une montagne, mais pourquoi sortir des béliers et des catapultes face à une montagne ? C’était un peu bête ça non ?

“Hum, on dirait aussi que y’a un gros truc à l’horizon… C’est quoi ? Une tempête de sable ou un truc du genre ?”

En tout cas, ça expliquait le pourquoi on se retrouvait avec des trucs complètement dépassés que resurgissaient de terre. Enfin, de sable, façon de parler. Mais avec le résultat d’une bataille devant nous, je crois que la visite allait être dangereuse.

“Bon, si j’devais parier, je dirais que le boss serait dans ce truc là-bas, qui ressemble à une ville.’’

Désert de Guerre ― Ambush

[Kathryn] -  J'ai quelques bouteilles si jamais tu en as de besoin. Répliquait-elle accompagnée d'un sourire chaleureux. Et puis, tu auras le redbull si jamais tu as besoin d'aile !

Continuait-elle en se pensant drôle. Une véritable blague digne d'un boomer. D'ailleurs, elle avait toujours trouvé ce slogan particulièrement étrange, mais depuis l'apparition des donjons et l'éveil d'une partie de la population, la psyché de la pugiliste ne put s'empêcher de divaguer vers les nouveaux commerciaux des compagnies. Certains étaient carrément capables de faire apparaître des ailes, grâce aux runes... Est-ce que Redbull avait refait une pub avec un comédien capable d'un tel acte ? Sans doute que oui, mais elle se laissait une note mentale d'aller se renseigner sur le sujet une fois le donjon terminé.

Une fois les premières impressions de tout un chacun passé, la multitude commençait a s'organiser réellement dans l'exploration du donjon. La demoiselle au Redbull prenait la tête de l'exploration et grimpait une petite dune afin d'accentuer son champ de vision. Identifiant ici et là quelques points d'intérêts, telle qu'une potentielle tempête ou bien un village au loin, elle émit un commentaire des plus intelligents. Certes, il était fort probable que le boss du donjon ait pris refuge au coeur des habitations de cet environnement atypique. Elle se demandait d'ailleurs qu'elle genre de monstre elle allait devoir affronté. Elle se croisait les doigts très fort pour que ce ne soit pas un hybride scorpions. Elle avait horreur des anthropodes.

Décidée de suivre les trouvailles de la jeune demoiselle, la multitude se mit finalement en route. Pas à pas, le groupe laissait des traces imbibées de sang et voyageait au coeur du champ de bataille qui l'avait accueilli. Faisant valser ses pupilles céruléennes, l'Américaine observait les carcasses près d'eux. Tantôt en partie ensevelit, tantôt quasiment exposé à la cruauté du soleil, elle ne pouvait voir que des humanoïdes jamais complètement humains. Deux têtes ici, une queue de lézard par là, quatre bras par ici.

Avançant avec anxiété, la jeune femme ne quittait pas le sol des yeux. Elle trouvait vraiment étrange le fait que le sang qui imbibait la terre était dans un état entre la sécheresse et la rivière. Trop concentrer par l'étrangeté de la situation, elle ne remarquait malheureusement pas les premiers mouvements provenant des cadavres se réanimant tranquillement. Si aucun ennemi n'était en vue, c'était simplement parce qu'ils étaient d'ores et déjà autour d'eux.

[Rôdeur] -  LES CADAVRES S'ANIMENT. Criait l'un des membres les plus perceptifs de la multitude.

Cette interpellation sortit la jeune femme de son fixe sur le sol et elle serrait les poings. La pugiliste adoptait une position de combat, tout comme le restant des membres du groupe, mais ce qu'elle vit ne put qu'être problématique. Autour d'eux, un nombre relativement élevé de cadavres venaient de se réveiller. Ils étaient d'ores et déjà encerclés, forçant la légion à adopter une position en cercle. Une embuscade... déjà... et ils ne venaient que de faire quelques pas dans le donjon.

La progression à travers les étendues de sables s’entama bien. Au moins, on avait une sorte d’objectif à la clef, et à vrai dire, c’était au moins une excellente nouvelle. Le pire dans ce genre de situation aurait été d’être complètement perdu et de ne pas avoir la moindre idée de où l’on devrait aller. Si c’était le cas, on aurait risqué de passer des heures, voir des jours dans ce donjon à s’assécher sous ce soleil complètement cuisant. Mais bon, au moins il suffisait qu’on avance à peu près en ligne droite tout en surveillant un peu les tempêtes de sables qui pouvaient visiblement passer par ici.

Et oui, en évitant aussi de se prendre une nouvelle fois du sable dans la bouche.

Je repensais tout de même à cette petite plaisanterie. Si Red Bull pouvait véritablement donner des ailes, ce serait clairement la boisson de tous les chasseurs. C’était juste un avantage extrême ! Mais bon, ils avaient eu un procès pour ce slogan, soit disant pour publicité mensongère… Un détail ça. Et le pire, c’était que si ça se réalisait ne serait-ce qu’une seule fois, les gens seraient complètement choqués, au point limite de dégringoler du haut du quarantième étage et-

Hein ? Un des types de notre groupe se prenait d’un coup à gueuler. Fallait dire que j’étais pas foncièrement la plus vigilante, un peu dans mon monde pour le coup. J’aurais aimée avoir de la musique dans l’immédiat, mais… Attends, les cadavres s’animaient ? Je regardais rapidement autour de moi, pour effectivement voir que les corps pourtant meurtris des différents machabés de la zone commençaient à se mouvoir, se relevant, sortant du sable comme une armée de zombie.

“Oh oh.”

Ouais. Petite réaction un peu délu pour le coup, alors que mes yeux s’écarquillaient d’une manière confuse face à l’arrivée de ces corps. Ils nous encerclaient en plus ? Euh… C’était un peu une situation de merde non ?

Tout le monde commençait à prendre les armes, se mettant en formation. En cercle, en dernier carrée, je ne savais quoi, mais c’était quand même un peu space de… Putain merde ! Fallait que je me réveille là ! J’étais dans un donjon, en train de risquer ma vie et celle d’autres personnes, et juste car je ne le réalisais pas dans la seconde j’étais en train de merder !

Merde merde, qu’est-ce qu’il fallait que je fasse ? Calme-toi, respire. T’as tes runes. T’as de la magie. Comment ça s’appelait déjà ? Un “coup blanc” ? Ouais, j’avais lu ça. Il fallait que je concentre mon énergie, que je la sente un parcourir mon corps, pour la libérer. En théorie c’était ça, mais en pratique… Euh merde, y’avait ces trucs qu’étaient en train d’avancer ! Concentres-toi putain !

Et d’un coup, presque involontairement, une décharge survint. J’envoyais une sorte d’onde d’air depuis ma main en direction d’un des monstres, auquel d’ailleurs il manquait la moitié du corps, ce qui le repoussa assez violement contre le sol, arrachant un morceau de chair assez gros en passage. Je… Je venais de faire quoi là ? Putain, c’était vraiment moi qui venait de faire ça ?! J’étais pas si inoffensive après tout-

Bam, un revers dans ma mâchoire de la part du second monstre, et je me retrouvais face contre terre, encore une fois, à bouffer du sable. Putain, je déteste cette impression là. Surtout que ça faisait un mal de chien ! Merde, je saignais en plus, non ? J’avais cette impression là… Du nez, évidemment.

Mais le monstre était toujours là, et en me retournant, je vis qu’il était juste au dessus de moi, s’apprêtant à assener un coup de hachoir qui devait faire au moins la moitié de mon corps facile !Oh merde ! Je me retrouvais dans l’urgence à rouler sur le côté, évitant de peu ce coup qui brassa le sable, avant de lancer la même vague d’air dans le bras de ce monstre. Par chance, cet endroit était complètement décousu, sanguinolant, au point où l’on voyait de base l’os. Et l’attaque bien placée s’occupa de lui arracher l’avant bras. C’était… Gore. Mais c’était aussi ma chance !

Attrapant l’arme au sol (et l’avant bras encore attaché dessus, je profitais du fait qu’il se tordait de douleur pour lui faire tomber en pleine tête sa propre arme ! Bon; plus la gravité que réellement par ma force, et plus dans la clavicule que la tête, mais ça semblait être bon pour lui. Fiou… C’était ça les combats ? Putain, j’étais pas prête, et j’étais déjà un peu blessée en plus…

Mais c’que je remarquais pas forcément, ou trop tard en tout cas, c’était que le premier des monstres que j’avais envoyé paitre s’était relevé, et était en train de foncer vers moi comme un rugbyman. Oh… Merde.

Désert de Guerre ― GASP !

Posant ses pupilles céruléenne sur les corps morts reprenant vie, la vision qui venait avec les lambeaux de chaire encore saignante lui lever légèrement le coeur. Entre ça et l'odeur de mort et de sang qui émanait des dunes tout entiers, il y avait de quoi faire vomir même le plus compétent des médecins légistes.

Dans tous les cas, il n'y avait pas trente-six façons de faire. La jeune femme était une combattante au corps à corps, quoique ses statistiques étaient particulièrement tristes et ne lui permettraient sans doute pas de se défendre avec efficacité. Elle avait en sa possession deux runes. Une verte qui avait muté, alors qu'elle l'avait déposé dans le système. Si elle appréciait particulièrement la liberté qui venait avec l'activation de cette dernière, sa seconde rune allait être complètement inutile. Une compétence afin de blesser et de faire taire les plus loquaces des mages... face à des morts-vivants sans voix... Ce n'était pas la chose la plus intéressante.

Observant les cadavres se saisir des armes rouillées, elle ne pouvait que laisser son esprit divaguer vers les maladies qu'elle pouvait bien attraper si l'une d'elles venait percer sa chaire.

Avant même que les créatures n'aient la chance d'atteindre le cercle intérieur de la multitude, les magiciens et le rôdeur avaient été les premiers a passer à l'offensive. Un éclair par ici, une onde de vent par là, les combattants à distance étaient entrée en action. Incapable de tout éliminer, une partie était parvenue à avancer jusqu'au regroupement. Un véritable chaos s'installait.

La bataille faisait rage. La multitude était engagée dans une guerre de sang, de sueur et de magie. L'embuscade tendue par les morts avait eu complètement raison de la moindre cohésion qui avait pu s'installer avant même de pénétrer au coeur de ce désert torride. Tant de minute passée à échanger sur les tenants et les aboutissants de nos positionnements. Tout ça, caduc, par le fait qu'il fallait se défendre d'absolument tous les côtés. Ça avait le don de vous foutre une organisation en l'air.

Évitant un coup par ici, la faiblarde joueuse avait contre-attaqué d'un coup de poing dans le maxillaire inférieur de son adversaire à trois trous d’yeux. Comme elle se doutait, elle n'avait pas infligé un quelconque dégât bien notable. Ça avait, certes, fait reculer le tas de morts de quelques pas, ses offensives n'avaient juste pas ce qu'il fallait pour percer adéquatement les défenses des morts.

Alors que la créature face a elle levait le bras, armé de son gladius, la pugiliste fonçait droit sur lui, pénétrant très près au corps à corps afin de rendre inefficace la moindre tentative de mouvement. Saisissant le bras armé de son adversaire, la demoiselle s'installait dans une clé de bras qu'elle tenait fermement, puis repoussait le corps d'un violent coup de pied, délogeant son épaule et, par le fait même, l'éjectait sans l'extrémité qu'elle tenait.

Laissant tomber au sol le bras squelettique qu'elle venait d'arracher, elle pouvait voir son adversaire se relever au côté d'une bête qui semblait avoir pris une sacrée claque de la part la jeune magicienne. Lui aussi en train de se relever, il semblait jeter son dévolu sur celle qui l'avait en partie exploser. Trop concentré dans son affrontement, alors que la jeune fille de saisissait de l'arme d'une des bêtes pour en éliminer une, Kathryn s'élançait droit vers les deux créatures. Donnant un coup de pied sur celui qu'elle avait elle-même éjecté, elle utilisait le momentum pour essayer d'envoyer au sol le rugbyman qui s'apprêtait à charger la magicienne. S'accrochant à son cou et essayant d'utiliser le poids de son corps pour l'amener au sol et abandonner son projet, elle fut surprise par son incompétence. Incapable de tackler, il s'élançait droit sur Julia, accompagné de Kathryn sur dos.

L’espace d’un instant, je crû être tranquille. C’était que bon, je crois que j’avais quelques moves un peu sympa. Rien d’exceptionnel, surtout vu les personnes qui pouvaient se trouver là. Des chasseurs, plus ou moins expérimentés… Mais pour moi, c’était une première, et j’étais un peu contente que ça vienne plutôt naturellement ! Ça aurait été un très mauvais moment pour apprendre que j’étais paralysée par la peur, et donc que j’allais rester stoïque face à la mort qui arrivait.

Mais… C’était trop beau évidemment. Sitôt que je tournais vers les yeux vers le groupe, je pu voir que la mêlée était… Sanglante. Bon, à notre avantage hein, mais c’était un bordel sans nom pour être honnête, et je dû être assez attentive pour distinguer ce qu’il se passait. Fallait que je trouve qui frapper maintenant, sans toucher des alliés au passages. Et c’était un peu compliqué, les gens passaient et repassaient… C’était comme un nuage pour symboliser les bagarres des bandes dessinées, avec une odeur nauséabonde et du sable encore sur mes lèvres.

Cependant, il y eu bien quelque chose qui vint vers moi ! Et c’était un de ces monstres ! Sa peau écailleuse et son corps en charpie était déjà glauque, mais… Fin il me chargeait dessus quoi ! Et le pire était que Kathryn, la blonde qui m’avait parlée tantôt, était accrochée sur lui ! Mais à quoi jouait-elle ? Et si c’était le cas, pourquoi je participais pas ? Oui bon, probablement car c’était ultra dangereux et que j’allais me faire rentrer dedans. Pas forcément quelque chose de très cool d’ailleurs.

D’un bond, ou plutôt d’un plongeon maladroit, je sautais dans le sable, pour, putain, ENCORE AVOIR DU SABLE PLEIN LA GUEULE ! J’en avais putain de marre là ! J’avais l’impression que c’était le thème de la journée là. Et le premier qui à la sortie me proposerait un sablé, j’allais lui péter la gueule sans faire preuve de cordialité ou d’aimabilité.

“O’ ‘a va ‘ier !”

Crachant de colère alors que mes narines beaucoup trop rouges se gonflèrent un peu, je me retourna vers le monstre qui venait de me charger. Il était entrer en colission avec un autre qui… Atends, c’était pas celui que j’avais envoyé paître ? Merde, j’avais été négligente pour le coup, mais bon, ils étaient entrés en collision, et semblaient être plus ou moins sonnés. L’occasion pour moi de leur faire bouffer la poussière. Ou le sable !

Me concentrant un peu, là, j’étais plutôt déter’, et je me retrouvais à utiliser une des runes que j’avais récupérée. Comment je l’avais eu ? C’était une longue histoire, mais c’était que pour le coup, ça pouvait toujours être pratique si jamais j’avais des emmerdes, et comme je trainais partout dans le monde, j’étais pas inconsciente au point de me dire que tout allait bien ! Enfin bon, c’était quand même un minimum pour aller dans un donjon, non ?

Bref, apparaissait devant moi dans une bourasque qui souleva le sable une forme d’esprit, un aigle, qui poussa un grand cri avant de prendre son envol. S’il lui fallut quelques secondes histoire de prendre un peu de vitesse, il frappa l’instant d’après avec une sacré vitesse, faisant tomber la tête d’un des monstres et entaillant critiquement l’autre d’un passage de ses aîles ! Surtout que j’avais mit la dose dedans, appliquant une bonne partie de mes forces dedans.

C’était ainsi que je me retrouvais avec un aigle domestique pour me suppléer ! Restait maintenant à frapper quelque peu ceux qui restaient, afin que l’on puisse s’en sortir ! Et si le combat avançait plutôt bien, un tremblement un peu bizarre vint à remuer le sable d’une manière… Un peu inquiétante.

“Euh… C’est pas trop normal ça. Genre le pressentiment que ça va être la merde dans les secondes à venir.”

Ouais, réflexion à voix haute. Surtout qu’un geyser de sable vint à décoller du sol à quelques centaines de mètres. J’étais pas une experte, mais ça, j’appelais ça un ver des sables. Et ça entrait dans la catégorie des énormes saloperies.

“On devrait courir !”

Désert de Guerre ―

Alors que sa monture involontaire avançait en direction de la magicienne, Kathryn essayait tant bien que mal de relâcher son emprise sur la bête. Cependant, un de ses bracelets s'était coincé entre deux os et était fermement attaché au corps de son adversaire. Elle avait beau tirer de toutes ses forces, elle n'était pas dans une position pour en générer tant que ça... et elle n'en possédait pas tant que ça non plus.

Condamnée à devoir suivre la créature dans cette pitoyable tentative de redirection, l'Américaine percutait  le tank du groupe qui, dû à la hauteur de ses défenses, ne semblait pas avoir été dérangé tant que ça. Enfin, il avait perdu pied au moment d'envoyer sa massue sur le crâne d'une des créatures, mais est-ce que c'était vraiment si grave qu'un tank manque son coup ? Kathryn ne pensait pas. Ayant finalement occasion d'exercer plus de pression, maintenant que la bête n'était plus en mouvement. Passant son bras gauche autour du cou de sa monture, elle venait le retenir à l'aide de son bras droit. Le mouvement était étrange, car c'était sa dextre qui était bloquée dans un des os de la créature, mais elle parvenait quand même à tenir le tout en place. Usant de la force de ses deux jambes et de sa propre statistique un peu triste, la jeune femme tirait la tête du cadavre. Dans un « pop » assez audible, le crâne se délogeait, achevant immédiatement la créature.

Cependant, alors qu'elle tenait l'article de sa victoire, une douleur poignante se faisait sentir au niveau de son bras. Si elle était parvenue a se défaire en même temps, l'os s'était fracturé et un éclat avait ouvert la chaire de Kathryn. Sa psyché ne pouvait qu'aller vers les possibles maladies qu'elle avait peut-être contractées.



N'ayant par contre pas trop le temps d'y réfléchir, le sol commençait à gronder. Saisissant un morceau de tissue, elle bandait sa blessure le temps qu'un soigneur puisse prendre le temps de régler son problème.

Devant elle, un gigantesque ver des sables venait de faire son apparition à quelques centaines de mètres de la multitude. Sans doute réveillée par les affrontements, la gigantesque menace débutait son avancée, emportant tout dans son chemin. La magicienne proposait la fuite, Kathryn ne pouvait qu'être d'accord.

[Kathryn] -  Partez en direction de la ville. Hurlait-elle Je m'occupe d'attirer le ver.

Terminait-elle en se mettant à courir en direction de la bête qui fonçait droit sur elle. Un geste un peu suicidaire, mais pour une fois, elle allait pouvoir être utile.

L’art de tomber de mal en pire… C’était probablement de ça qu’était constituée chaque expérience dans un donjon. Autrement, cela aurait été trop simple. Juste passer d’un groupe de monstre à un autre sans que quelque chose dans l’opération ne vienne à prendre une tournure catastrophique. Ouais, c’était à peu près ça à quoi je pensais dans l’immédiat, pendant que j’avais commencée à prendre mes jambes à mon cou !

Dans les faits… eh bien, le sable qui sortait par geysers et la proximité de la créature avait tôt fait d’en motiver d’autres à courir ! Seulement, Kathryn, dans un élan de courage ou de pulsions suicidaire, prit l’initiative afin d’attirer le ver géant ! Personnellement, ça me paraissait être une idée complètement folle, mais si elle avait un plan derrière la tête, je n’allais pas lui en empêcher ! D’autant que la créature passa un instant tout de même sur le lieu du combat, aspirant les corps et le sang pendant quelques secondes avant de se jeter à la poursuite du membre de notre groupe. Évidemment, sans yeux, ses repères devaient être différents, et à n’en pas douter, il devait se servir du son, ou à minima des vibrations pour se repérer.

Cependant elle était loin, de notre côté, je suivais le mouvement au pas de course. L’aigle que j’avais invoqué s’occupait de trancher d’un coup d’aile les monstres qui commençaient à s’animer mais qui n’avaient pas encore eu le temps de pleinement se mettre debout. Pour ceux qui résistaient, ceux qui pouvaient frapper à distance tentèrent quelques tirs. Certains étaient audacieux, d’autres juste complètement loupés.

“On va pas juste l’abandonner ?”

“C’est elle qui s’est mise dans ça !”

“On peut l’attendre quand même !”

Et dire ça en courant était tout de même assez difficile. Il allait falloir qu’on se mette à l’abris pour qu’elle puisse nous rejoindre, mais… On était déjà un peu loin. Cependant, il y avait quelques strucutres qui dépassaient suffisamment du sable pour servir d’abris, et l’un d’eux était juste à côté :

“Dans la tour de siège, là !”

Dedans, on pourrait fermer la porte et contenir sans trop de problème les monstres qui viendraient. Mais surtout pour moi, c’était l’occasion de monter tout en haut de cette chose là ! Évidemment, l’ascension fut un peu complexe, le bois branlant et la structure légèrement instable n’aidait pas, mais c’était également le pied de me retrouver si haut ! Et au moins, j’allais pouvoir guetter le retour de Kathryn. En espérant qu’elle s’en sorte, avec les dunes, je ne la voyais même plus. Merde, j’étais inquiète maintenant… Euh… Bon, vu la troupe avec qui j’étais, je pouvais au moins lui envoyer l’aigle ! Il saurait la ramener jusqu’à nous !

Désert de Guerre ―

Il fallait le dire, l'idée d'attirer la bête géante capable d'engloutir une personne d'un seul coup n'était pas sa meilleure. Certes, elle avait un plan. Certes, elle possédait une capacité pour ce genre de situation, mais ça ne rendait pas moins sa tentative sécuritaire. Au fond elle, elle paniquait, c'était normal, mais ce genre de situation était particulièrement stimulante pour la pugiliste. Sa réaction face aux stress et aux situations de vie ou de mort avait toujours été de se battre et non pas de fuir. Il fallait croire qu'ici, ça n'allait pas être différent.

Activant un peu d'avance sa compétence, afin de ne pas être pris de court advenant un pépin imprévu, l'Américain rayonnait légèrement. Ses pieds continuaient de toucher au sol, se doutant que c'était la façon que devait avoir la bête pour détecter ses proies, elle courrait le plus vite qu'elle pouvait. Elle la voyait bien sortir sa tête du sable pour engloutir sangs et cadavres, sa seule présence était particulièrement problématique, mais ça, elle l'aborderait en temps et lieu avec la multitude.



[Kathryn] -  Bon, c'est partie.

Se disait-elle en guise d'encouragement, alors que la créature n'était plus qu'a quelques mètres d'elle. D'un seul bond, elle s'envolait dans les cieux, comme si la gravité n'avait plus le moindre pouvoir sur sa personne. La créature sortie d'un seul coup, essayant d'attraper la jeune femme qui parvint à gagner suffisamment d'altitude pour ne pas finir dans l'estomac de la créature.

Se posant de l'autre côté de la bête et dans la direction inverse de son groupe, Kathryn reprit sa course en espérant faire changer la créature de direction. Regardant derrière elle, il ne faisait aucun doute que la bête avait décidé de faire de l'Américaine sa proie. Faisant demi-tour, cette dernière partait aux trousses de son repas.

Gagnant quelques mètres et permettant aux groupes de rejoindre l'abri d'une structure, la pugiliste se renvoya une deuxième fois dans les cieux, alors que la bête arrivait près d'elle. Esquivant la gueule de la bête, Kathryn croisait les doigts pour qu'elle n'ait pas d'attaque à distance. Ce qui ne semblait pas être le cas. Cependant, quelques cadavres s'étaient animés dans sa course, dont des archers. Sans crier gare, Kathryn reçut une flèche qui pénétrait son épaule gauche. Ce n'était pas suffisant pour la faire tomber, ce n'était pas comme ça que sa compétence fonctionnait de toute façon, elle prit rapidement la direction de la protection de la tour.



Devant éviter un véritable barrage de flèche, elle put égratigner ici et là, mais aucune blessure plus sévère. Sur le toi de la tour, la jeune mage semblait regarder ce qui se passe. Arrivant un peu en catastrophe, ne prend pas la peine de contrôler son atterrissage, Kathryn se posait dans un tel fracas que le bois pourri qui la retenait s'écroulait, l'emportant vers les étages inférieurs.

Toujours sous les effets de sa rune, elle saisit Julia et amortie leurs chutes.

[Kathryn] -  Désolé pour tout ça.

Répliquait-elle le sourire aux lèvres.

Pendant un temps, j’admettais sans peine que j’étais stressée. Le savais que les donjons étaient des endroits extrêmement dangereux, et que tous n’en ressortaient pas. Ça, j’en étais bien au courant, même si j’ignorais le pourcentage. J’avais juste pas envie que quelqu’un du groupe vienne à mourir d’une telle manière… Ou a mourir trop simplement.

Ouais, pour le coup, j’étais peut-être trop naïve, trop empathique. Ça se voyais sans peine que j’étais une nouvelle, et que par conséquent, ce que je faisais était encore plus régi par mes émotions, mes peurs et tout que par une véritable conscience stratégique. A côté de ça, certains, habitués aux morts malheureuses, grognaient presque contre ma volonté de l’attendre. Un cynisme terrible tout de même, mais basé sur bien des choses à n’en pas douter.

Mais j’eu raison ! Kathryn vint à revenir, même si ce n’était pas à la force de ses jambes. Et pour cause, elle lévitait dans l’air arrivant à toute hâte jusqu’à la tour ! Cependant, une flèche vint à l’atteindre en plein vol, manquant de la faire tomber. Mais elle arriva, entière, et un peu vite. Un peu trop vite quand même, au point où…

Oh. Je crois qu’elle n’allait pas vraiment s’arrêter.

Et effectivement, ce fut un peu violent ! En atterissant sur le toit de la tour, elle et moi vinrent à reculer de quelques étages, non sans passer à travers des buches mal en point et des planches vermoulues. Cependant, lorsque la chose se stabilisa enfin, je devais admettre que j’étais un peu sonnée. J’avais prit quelques coups dans la dégringolade, mais… ça allait globalement, étant donné qu’elle avait prit la majorité des impacts.

“Euh… C’était plus un crash qu’un atterrissage, mais B- pour l’effort.”

Ouais, petite blague histoire de calmer le jeu un peu alors que je me relevais, ayant un peu de mal à marcher dans cet environnement nettement plus instable. Un soigneur vint à rapidement venir, afin de s’occuper des blessures qui commençaient à s’accumuler sur la jeune femme, alors de mon côté, je regardais à travers les fentes du bois ce qu’il se passait derrière nous.

“On dirait que le ver en profite pour se jeter sur les cadavres qu’on a réveillé. Ça devrait l’occuper, et peut-être même lui couper l’appétit.”

Ça, c’était sur un coup de bol, et j’espérais ne pas trop en souhaiter. En tout cas, mon aigle continua de faire quelques passages dans les environs, afin de balayer les monstres qui restaient. Cependant, on allait pas survivre en restant juste ici. Il fallait qu’on progresse à travers ce désert pour rejoindre cette ville presque mirage qui pointait en route.

“Bon, plus qu’à se remettre en route ! En espérant pas tomber sur d’autres embuscades de morts. Mais maintenant qu’on sait, ça devrait se faire non ?”

Ou jusqu’à ce que ce donjon nous réserve d’autres pièges. Mais il fallait bien progresser un peu.

“Dans tous les cas, si on reste ici jusqu’à la prochaine tempête de sable, on va prendre cher, et je préférerais éviter d’avoir encore du sable dans la bouche.”

Désert de Guerre ―

[Kathryn] -  Je dois définitivement travailler les atterrissages. Rigolait-elle à la blague de Julia.

Sans perdre trop de temps, le soigneur de la multitude vint donner un coup de main aux deux femmes descendues des cieux. Si l'atterrissage n'avait pas été agréable, c'était la flèche rouillée et pleine de sang inconnu qui la faisait stresser. Encore une fois, elle ne pouvait que s'imaginer attraper le tétanos au coeur de ce donjon. Elle espérait sincèrement que les soins prodigués par leur alliée pouvaient lui débarrasser des quelques maladies qu'elle avait dû attraper dans ce donjon.



Ça avait quand même un petit je-ne-sais-quoi d'unique de voir travailler la magie curative. Ses plaies se refermaient doucement et la douleur s'amenuisait. Si la qualité des soins n'était pas parfaite, il restait quand même un simple rang E, il fallait dire qu'il avait fait un bon travail.

S'en suivit un petit moment de repos. La multitude prenait le temps de respirer un peu, tandis que Julia, elle, continuait d'observer l'extérieur. Certains discutaient de tout et de rien. D'autres parlaient stratégies et façon de terminer le donjon. Il ne semblait pas avoir de cristal dans ce donjon, tous les E n'en avaient pas, et il serait impossible au groupe de ramener le corps du vers. Plusieurs perdaient l'intérêt de poursuivre. Ce donjon ne s'annonçait pas lucratif du tout, surtout considèrent que le monstre des sables avalait leur fortune.

[Kathryn] -  Aller... Peut-être qu'il y a des cristaux dans la ville au loin ?

Répliquait-elle afin de convaincre les moins intéressés de rester. Sauf qu'elle n'était pas dupe, ce ne serait sans doute même pas le cas. D'autant plus que ce qu'elle allait avancer n'allait pas aider pour qu'ils restent.

[Kathryn] -  La présence de ce gros ver me pose un sérieux problème. Normalement, dans un donjon, le boss est le monstre le plus en haut de la chaîne alimentaire. L'être le plus fort de l'étage et qui peut écraser les autres sans trop de problèmes.

Déjà, certains pouvaient voir où elle s'en allait.

[Kathryn] -  La présence de ce ver... Soit c'est le boss, soit le boss est encore plus imposant... capable de ne faire qu'une seule boucher de cette bête des sables...

Une réalisation que certains n'avaient pas faite encore. Sans doute était-ce là l'expérience de Kathryn qui parlait, mais elle commençait à se dire que ce donjon avait mal été évalué. La multitude était-elle réellement dans un donjon E ?

[Kathryn] -  Est-ce que ça vaut vraiment la peine d'aller dans la ville au loin sachant que le boss est peut-être le ver ? J'en entends déjà plusieurs dire qu'il vaudrait mieux rebrousser chemin, mais il ne faut pas oublier que ça fait 6 jours que le portail est ouvert. Ils n'auront jamais le temps de créer une seconde équipe pour un donjon E à temps et ce ver serait relâché dans le monde. On ne peut pas reculer...

Je profitais de cette petite pause pour sortir une des canette de mon sac, l’ouvrant dans un “Pshiiiit” caractéristique et buvant plusieurs gorgées de ce breuvage bien particulier. Et si le goût était pas terrible, j’avais littéralement l’impression de boire du chewing-gum, peut-être que les effets par la suite ne devraient pas être si dégueulasse. Enfin, probablement que si, mais vu que c’était une boisson énergissante, j’avais espoir que ça me mette en forme pour le reste de cette aventure.

Egalement, je m’essuyais le nez. Tout du moins, le sang qui coulait. C’était pas foncièrement agréable pour être franche, mais ça m’empêcherait pas de participer. J’étais pas une de ces princesse qui, au moindre ongle perdu, se retrouvait sur le banc de touche à se torde de douleur. Ou un footballer pro, ça passait aussi.

Cependant, un climat un peu plus moche se dressait. De ce que je comprenais, l’absence de cristaux, les dangers présents et tout le bazar démotivaient un peu certain. Sérieusement ? Ils en étaient déjà à ce point ?! On venait de commencer ! Certes c’était dangereux, mais quand même quoi ! Puis bon des cristaux, on allait surement en trouver plus loin ! Avec le sable, l’opération était dangereuse quand même. Toutefois, il y avait la théorie comme quoi le ver était le boss du donjon, mais j’étais pas foncièrement d’accord.

“Perso je pense pas. Le ver… Il a l’air de pouvoir être trompé. C’qui a l’air de chercher lui, c’est de manger. C’est un peu un aléa qu’on doit prendre en compte plus qu’un ennemi. Le boss lui, sera probablement pas plus fort que le ver ! Cependant, lui on sera sûr à 100% qu’il voudra nous faire du mal, et par tous les moyens possibles.”

La force n’était pas que physique autant dire. Si le ver était con comme un balai à n’en pas douter, le boss avait peut-être un PHD de physique nucléaire. Enfin, façon de parler. Puis le brevet des écoles serait déjà pas mal pour un monstre de donjon, ne soyons pas trop exigeante. Si les monstres commençaient à faire autre chose que de taper, on serait un peu dans la merde.

“Après, pour les ressources, c’est pas impossible que la tempête de sable à venir balaye un peu tout, et par conséquent, qu’on trouve de nouvelles choses dans son sillage. Et ça peut être autant des monstres que des cristaux ou des trésors ! Le hic, c’est qu’il faut survivre à cette tempête, et pour ça… Ouais, faut qu’on se trouve un abri, et je suis pas certaine que cette tour sera très efficace.”

La question d’où se posait cependant. D’autres tours jalonnaient le désert, mais cela serait peut-être un peu complexe de se faire un abri concret.

“Hum… Si on prend un des béliers sur le chemin, le risque c’est qu’on finisse enseveli. Je dirais que la meilleure solution qu’on ait, c’est soit de rejoindre la ville sans combattre le boss, ce qui est assez risqué, soit de prendre du bois sur une tour pour en consolider une deuxième le temps que la tempête ne passe.”

Et ouais, j’avais beau être nouvelle, j’hésitais pas à donner mon avis. Et entre ça et le fait que Kathryn tentait de motiver ce beau monde, peut-être qu’on allait redonner l’espoir ! Enfin, tant que j’avais leur attention, j’en profitais pour poser une question :

“Au fait, vu qu’on est sur un moment de pause. Y’en a qui sont familliers avec le concept de “Joueurs” ?”

Vu comment la majorité me lancèrent un regard particulièrement confus, se demandant probablement quelle sauce piquante j’avais fumée. Et je crois que je venais faire choux blanc.

“Ouais, laissez tomber.”

Désert de Guerre ― Repos

Les analyses de Julia étaient pertinentes et ses idées amener un autre train de réflexion. Était-il possible pour un monstre de n'être qu'un élément lié aux décors ? Après tout, la bête des sables voulait autant manger les chasseurs que les corps animés défendant le donjon. Peut-être était-ce ici un monde dans lequel une guerre constante se livrait et qu'il y avait plusieurs parties dans ce conflit, dont le ver géant ? Dans tous les cas,  le véritable problème pour le moment était la tempête de sable qui se dirigeait droit vers eux. Au final, le groupe allait avoir un mois pour fermer le donjon, à quelques jours près, et si la tempête perdurait aussi longtemps ? Après tout, la physique des donjons n'était pas la même que celle du monde réel.

[Kathryn] -  Dans tous les cas, on aura jamais le temps d'aller à la ville, d'éliminer le boss et de revenir au portail. La tempête va nous tomber dessus bien avant ça et si le boss est mort, il est pas impossible qu'on reste piéger ici.

Et l'idée de voir le portail se refermer devant eux ne l'enchantait pas du tout.

[Kathryn] -  Autant ne pas prendre la chance d'agro le boss. Il est possible que la ville soit son terrain et que dès qu'on y rentre, on le réveille. J'opterais plus pour la deuxième option.

Répliquait-elle en portant sa dextre à son menton. Est-ce que la multitude allait même être capable de rejoindre l'autre tour avec le ver dans les parages ? Après tout, les piliers de bois n'étaient pas spécialement légers. C'est alors qu'elle voyait un des guerriers du groupe en soulever un comme si de rien n'était. Sans doute souhaitait-il lui-même voir le poids de ce qui devait être transporté.

[Guerrier] -  Aller, ça ne pèse rien. Je peux facilement les transporter.

Ça épatait toujours Kathryn de voir l'impact de l'éveil sur les capacités humaines. Dans tous les cas, il était désormais temps de souffler un peu. Le groupe allait de toute façon devoir attendre que le ver s'éloigne un peu ou soit attiré par autre chose. Tant qu'il était dans les parages, impossible de se rendre jusqu'à une deuxième tour.

Profitant du moment, la multitude échangeait quelques plaisanteries et quelques mots. Jusqu'à ce que Julia prononce quelque chose qui, très franchement, avait fait sauter un battement au pauvre coeur de l'Américaine. Venait-elle vraiment de faire référence aux systèmes ? C'était la première fois qu'elle rencontrait quelqu'un qui abordait le phénomène sans quoi elle ne serait même pas ici en ce moment. Cependant, Kathryn s'était toujours dit qu'elle garderait secret tout ça. Devait-elle briser ça ? Julia voyait-elle des bulles systèmes elle aussi ? Tant de question...

Mais, alors qu'elle s'apprêtait a parler, les commentaires de la multitude la ramenait sur terre. Non, ce n'était pas quelque chose qu'elle pouvait avouer. Aussi, elle choisit de se dissimuler dans la multitude et de jouer sur les mots.

[Kathryn] -  Boys are Players. Répliquait-elle.C'est de ça que tu parles ? C'est une expression qu'on utilise pour décrire un gars qui saute de femme en femme et qui flirt sans arrêt.