Cela faisait quelques mois que Nils travaillait sous la pression. Et pourtant, la pression, ça le connaissait ... Il voyageait ici et là pour le bien de la guilde, ayant toujours été conscient qu'être si haut placé ne garantissait pas une vie pépère derrière son bureau. Mais il s'y était fait. Non, ce qui le travaillait réellement, c'était bien entendu les fameuses menaces de la guilde des faucheurs. Elena, qu'est-ce qu'elle avait bien pu faire ? Pourquoi ce cadeau empoisonné, si tôt après sa mort ? Il aurait voulu enquêter sur le lien qu'avait Elena avec la guilde des Faucheurs, ne serait-ce que pour apaiser son âme mais s'il faisait ce genre de chose et qu'on s'en doutait ... Les menaces seraient mises à exécution. Mila, sa petite fille, risquait de subir le même sort que la mère. Rien ne vaut le risque. Rien.

Depuis qu'il a reçu ces menaces, Nils a mit un point d'honneur à travailler beaucoup plus proche de la maison, voir à ne pas voyager du tout, trouvant des trucs et astuces auprès de Rita Lombardi pour réduire son angle d'attaque vis-à-vis de l'aspect financier de la guilde de la gloire. Oh, bien entendu, internet et les conférences en ligne existaient pour une raison mais une part du succès de Nils venait d'un charisme qui était bien plus efficace en personne. La signature d'un contrat ne se passe pas dans un bureau, elle se passe autour d'un café ou pourquoi pas un verre de vin dans un club chic où on parle de tout sauf de boulot. C'est le contact, le feeling qui conclut les marchés les plus équitables et difficiles. Mais soit. Tout ce blabla commercial était loin de son esprit désormais.

Il avait officiellement finit sa journée, avait même expédié les heures supplémentaires qu'il aurait du faire pour rattraper quelques coquilles dans son service pour être à l'heure pour Mila. Elle ne pourrait pas être plus en sécurité qu'avec lui après tout. Laisser le moins d'opportunité à ces crapules pour la surveiller et lui faire du mal même si pour l'instant, il suivait leurs revendications à la lettre. Et puis, parfois, un moment d'insouciance avec les gens qu'on aime, c'était tout ce qui fallait pour se recharger les batteries, n'est-ce pas ?

... Ah, pourquoi se leurrer ? Il ne connaitrait la paix que lorsqu'il aura trouver une solution à ce casse-tête malsain.

La journée était belle et l'école de Mila respirait la simplicité, la nostalgie, une joie de vivre innocente depuis longtemps perdu pour un adulte comme lui, pour le headmanager des finances de l'une des plus grande guilde au monde. Une banlieue de New York, loin du centre ville agité, mais que le mot "banlieue" ne retire rien au charme de l'endroit. Il avait mit sa fille dans une école renommée. Cher, mais à la réputation impeccable. Autant que les milliers qu'il se fait par mois, voir même par semaine, serve à quelque chose de plus utilise que de simplement acheter de nouvelles voitures. Parlant de ça, il attendait l'heure de la sortie de l'école dans une limousine noir, garée pas trop loin de la sortie de l'école. Le chauffeur était un homme de confiance et il savait que Mila adorait être reconduite dans un véhicule comme celui-là. Après tout, il y a du confort, de l'espace... Et vu sa taille, pas forcement tout les jours qu'elle puisse se tenir debout et sautiller dans une voiture.

Lorsque l'heure arriva, le chasseur sortit de la voiture, dévoilant sa traditionnelle tenue d'homme d'affaire, couleur brune, tout dans la sobriété. Il ajusta ses lunettes ronde et afficha son plus beau sourire pour cacher son inquiétude lorsqu'il retrouvera sa Mila chérie. Jouer la comédie, c'était un peu son métier aussi. Les talons de ses souliers claquèrent sur le sol et vinrent bientôt se confondre avec le léger brouhaha que causait le rassemblement de parent à la sortie de l'école. Dos bien droit, gestuelle aimable et polie, il échangea quelques brefs mots avec des parents qu'il connaissait avant de s'avancer d'avantage dans la cours de récréation où les enfants commençaient à affluer, désireux de récupérer sa fille au plus vite.

Celle-ci fut accompagnée par une des éducatrices qui travaillait ici, une certaine madame Scarlet avec qui il avait déjà échangé de nombreuses fois sur le parcours scolaire de sa fille. Mila n'était pas une enfant à problème, mais l'inverse était déjà arrivé. On avait déjà essayé de lui chercher la misère et il n'y a pas si longtemps que ça, les professeurs eux-mêmes ont pointé une certaine dispersion et Nils avait prit les choses en mains. Aucun problème n'est trop "petit" quand il s'agit de sa fille. Confronter les parents des harceleurs de sa fille, pression sur le staff... En tout bien tout honneur. Depuis, ces événements, il faisait de prendre des nouvelles auprès du personnel de l'école quotidiennement une règle.

Il posa un genoux à terre pour prendre sa petite fille dans ses bras lorsqu'elle se jeta sur lui, riant un peu avec elle. "Ma petite fille ! Tu as l'air radieuse, ça s'est bien passé à l'école ?"

"Oui ! Madame Smith nous a emmené à Central Park aujourd'hui pour cueillir des champignons ! J'ai pu faire un câlin à un canard, hihi !"

... Oh, vu la situation actuelle, il n'était pas des plus heureux d'entendre que sa fille s'était aventuré loin de l'école, accompagnée ou non. Après tout, ce n'était pas Madame Smith qui allait la protéger d'un faucheur belliqueux. Il devra voir ça avec elle dans la soirée, il avait déjà les numéros de tout le monde. Mais bien entendu, il ne montra pas son inquiétude. Elle n'y était pour rien là dedans.

"Oh ? Je ne savais pas que tu aime les canards. Papa va t'emmener les voir plus souvent si tu veux."

Une exclamation affirmative plus tard de la part de Mila et le commerçant dirigea enfin son attention sur l'éducatrice qui devait regarder le spectacle de loin. Et comme à chaque fois, surtout depuis l'accident, il prit des nouvelles.

"Bonjour, madame Griffith. Comment allez-vous ? Tout s'est bien passé avec Mila aujourd'hui ? Les professeurs sont content d'elle ?"

Il s'attendait bien entendu à ce que l'éducatrice comprenne ce qu'il voulait dire par là, c'était un peu la danse qu'ils exécutaient à chaque fois pour ne pas parler de harcèlement directement en face de Mila. Mais quelque chose semblait clocher, aujourd'hui ...

Heureusement qu’elle semblait prendre tout ça avec une certaine légèreté au final car à un moment, il hésitait même à simplement appeler les urgences de peur qu’elle fasse un malaise. Mais au final, elle cachait au moins bien son jeu ? Il faudrait qu’il l’observe un peu plus pour véritablement la jauger. Mais soit, elle semblait accepter, ce qui était dans son intérêt immédiat.

Il répondit avec ce même ton aimable. « Oh, prenez votre temps ~ »

Il attendit alors quelques minutes à la grille de l’école, réfléchissant à comment aborder la chose avec l’éducatrice avant d’engager la marche lorsque celle-ci vint le rejoindre, affirmant leur départ d’un geste de la tête et d’un ricanement détaché. Il avait déjà un avant-gout de qui était réellement cette madame Griffith, la voyant plus souriant que d’habitude. Normal, dans un contexte subitement beaucoup moins professionnel.
Il n’eut pas le temps d’engager une quelconque conversation que la rousse s’en chargea pour lui. Une  question qui le fit sincèrement rire. Même s’il avait l’air à l’aise et portait en général le masque d’un homme d’affaire charismatique, qui savait où il allait et qui était inébranlable… Tout ceci n’est qu’une façade. Il ne se sentait pas gêné ou quoi que se soit mais jamais il aurait engagé dans de telles activités s’il n’y avait pas un but plus « professionnel » derrière. Alors inviter les gentes dames ? Ah … Si Elena n’avait jamais fait le premier pas, peut-être qu’il n’aurait jamais su ce que ça fait.

« Pardonnez-moi cette initiative un peu hâtive, alors … Mais non. Cela ne m’arrive en réalité jamais. Les seules fois où ce miracle s’est produit, c’était pour parler de chiffres et signer des documents … Rien de bien romantique, donc. »

Y avait-il implication que sa manœuvre avait pour but quelque chose de romantique ? Non, mais cela pouvait prêter à confusion. Il ne formula la chose ainsi que parce qu’il ne voyait pas pourquoi un homme inviterait si « souvent » des femmes, si ce n’est par amour ou … envie.

« J’avais juste envie de récompenser votre patience et votre assiduité dans toute cette affaire. Fut un temps, j’étais moi-même victime d’harcèlement à l’école … C’est pour cela que je met un point d’honneur à ce que cette affaire soit suivie. Car mes parents, eux, ne l’on pas suivit. » Il soupira mais garda un petit sourire. Pas la peine d’obscurcir le tableau plus que nécessaire … « Mais quand bien même tout ceci ne s’était pas produit … Vous m’avez l’air d’une femme charmante. Nous nous connaissons en réalité depuis relativement longtemps, sans réellement nous connaitre. Une honteuse injustice qui mérite réparation, si vous voulez mon avis ~ » Comme dit plus tôt, le café n’était vraiment pas loin de l’école et ils y arrivèrent rapidement. Avenant, il tira une chaise en terrasse après qu’il lui ait laissé le choix de la table, l’invitant à s’y asseoir avant de la rejoindre.

Le serveur ne tarda pas et Nils prit la parole  « Un café viennois, je vous prie … Avec un Merveilleux. » Pour ensuite assurer à celle qu’il a invitée… « Prenez tout ce que vous désirez. Je vous l’offre avec plaisir ~ » Gardant le sourire, elle la laissa commander et laissa le serveur partir avec la commande avant de reprendre tout naturellement.

« Hmm. Je suis curieux, Scarlet… Je peux vous appeler Scarlet ? » Il se rectifiera si elle montre une quelconque résistance, cela serait alors « Madame Griffith ». « Qu’est-ce qui vous motive, après l’école ? Car je suppose que votre vie ne tourne pas toujours autant des enfants. » Quoi que ? « Par exemple, vous devez sans doute me connaitre comme le vilain homme d’affaire qui a un jour ouvert toutes les portes jusqu’à arriver en face du directeur, ahah … Mais derrière les lunettes et la cravate … » Il enleva ses lunette, sortit une lingette de sa veste pour nettoyer ses verres, se penchant un peu en avant comme lui avouer dans la confidence la plus totale. « Se cache un passionné de rock par exemple … Je sais, je n’en ais pas l’air ~ » Et il remit ses lunettes.

Il y avait une méthode dans ce début de conversation cependant. Il refermera son piège bien assez vite. Oh, pas que toute interaction devait être un combat, bien entendu mais … Ah, que voulez-vous ? Après plus de dix ans à mesurer chaque mots pou égaler et surpasser ceux du requin d’en face…