Une bonne grosse journée de merde, voilà comment je résumerais cette putain d’après-midi au travail.

Comme tous les Samedis, j’commence que vers les 14h au taf, soit, en d’autres termes, j’peux me faire une bonne grasse mat’ des familles. Ouais, sauf que cette fois-ci, j’ai été appelée en renfort exceptionnel pour midi afin de remplacer un collègue qui s’est pété le coccyx en tombant dans les escaliers de sa cave alors qu’il descendait pour s’assurer que son disjoncteur était safe et que ce qu’il entreposait là-dessous était à l’abris de l’eau grimpant à niveau de mollets dû aux inondations de cette année. C’est pas tous les jours que y’a des inondations en Belgique, surtout pas sur la capitale, mais quand ça arrive, ça ne fait pas semblant. DU COUP, moi qui pieutais bien pénard, j’me fais réveiller en trombe pour venir aider et, SURPRISE, travaux sur la voie. J’rate le bus de l’heure, attends une putain d’heure complète, vais d’une gare à l’autre et tape le plus gros sprint de la gare de Bruxelles-Midi à l’Avenue Toison d’Or d’Ixelles pour arriver juste à l’heure, TOUT ÇA POUR M’ANNONCE QUE NOTRE LIVRAISON ALLAIT FINALEMENT ARRIVER À 14h AU LIEU DE MIDI.

Un peu dégoûtée d’avoir perdu l’équivalent de deux heures de ma vie, surtout que cette foutue livraison, bah j’ai pu la faire toute seule puisque mon seul connard de collègue présent avec moi est parti manger à l’arrivé du camion contenant nos quelques 4000 pièces de matos et qu’on est livré par le roi des cons… J’use encore de ma force à bon escient donc, m’occupe de répartir le matériel entre la librairie, mon stock et la surface de vente, juste à temps pour que mister trouduc revienne de sa pause comme une fleur – avec 10 minutes de retard mais j’en suis pas à ça près – pour m’annoncer qu’il va rester au SAV afin que je n’ai pas à me coltiner la clientèle relou compte de mon état. T’as raison, connard, fuit ta race ou tu voles dans le stock.

Urrhhh… Anyway, m’occuper seule de mon stock pendant quelques heures a au moins eu la décence de me calmer, un peu du moins… C’est clair que c’était plus agréable que d’enchaîner non-stop des Donjons de rang C en essayant de devenir plus puissante. Moins intéressant, moins de rencontres funs comme cette healeuse sur la plage mais plus calme et stable… Y’a pas à dire, j’préfère aider les plus jeunes à ne pas se faire botter le cul dans des Donjons en-deçà de mon niveau ou aider des amis avec des Donjons. Faudrait que je pense à aller faire un coucou à Scarlet, Cordelai et Julia un de ces quatre… Ça va faire un moment maintenant. La même pour mon oncle. Enfin, chaque chose en son temps.

J’avais bien commencé plus tôt mais impossible de négocier à partir plus tôt du coup, j’me tape la fermeture et me prépare mentalement à rentrer chez moi pour pas d’heure. J’en suis à un point où j’pourrais presque courir du boulot à chez moi et j’mettrais autant de temps que les trains et bus mais j’avais ni la tête, ni l’envie de me prendre la tête avec les flics s’ils me pinçaient à user de mes capacités surhumaines alors que j’suis pas censée le faire…

Le tout étant, mon supérieur direct m’accorda de partir plus tôt du boulot en prenant ma place au stock après que je lui ai annoncé que j’avais été appelé en renfort urgent pour un Donjon qui viendrait de s’ouvrir dans ma région. Cette fois-ci, ce n’était pas une guilde qui m’avait contacté ni même quelqu’un qui était passé par le service d’une Guilde mais bien un indépendant qui aurait eu mon numéro par un ancien coéquipier de Donjons avec qui j’aurais échangé mon Numéro. C’pas impossible mais ça ne me revenait pas. J’vais pas mentir, j’ai essayé de décliner l’offre en expliquant que j’étais pas prête, que j’avais pas de matos et que j’me voyais mal faire un aller-retour de chez moi à la faille mais, un peu forceur dans le texte, le gars qui m’a appelé m’a expliqué qu’on me fournirait une épée longue une fois sur place. Un peu forcée et d’envie à massacrer des connards, j’ai fini par accepter. Au moins, j’avais une excuse pour prendre un train et, donc, un bus d’avance…

De retour dans ma région le pas lourd et les mains dans les poches, j’me mettais déjà à râler quant à l’idée de faire un Donjon à cette heure et, surtout, après une telle journée de merde… Je doutais de ma capacité à rester éveillée même si le niveau du Donjon semblait plus qu’à ma portée. Mais bon, bon prince que je suis, j’me fais passer après mes « devoirs » et embarque tête baissée dans la première aventure qui se pointe, yeaaaaaah. Ouep, l’enthousiasme est à son comble.



« … In my heart I know not an ounce of fear. We are waiting here my trusted axe and me. Just come at me, I will not flee. Death! I know that it awaits. Soon I will enter Valhalla's gates! »

Une musique bien vénère dans les oreilles, je me mets en route vers le lieu de rendez-vous en chantonnant en même temps. Quitte à avoir besoin d’Anarchie pour rester éveillée, autant s’en donner en avance. Après vérification, ce donjon se trouvait dans une zone que je connaissais bien. Une partie rurale de la ville qui relie deux communes, pas spécialement difficile d’accès mais pas non plus à la portée de n’importe quel flemmard qui n’a pas le courage de marcher une demi-heure et préfère sortir sa voiture pour trois pauvres kilomètres sous prétexte qu’ils sont fatigués. J’juge ? Nah, j’pointe des faits. Anyway, j’aurais pu faire un crochet par chez moi mais j’étais trop occupée à être dans ma tête à chanter à voix basse et, surtout, j’m’en suis pas rendue compte. Mais, si j’avais eu la tête ailleurs que dans la lune, j’me serais rendue compte que cette faille était étrangement proche de mon ancien lieu de vie… J’espère qu’on ne va pas se retrouver avec un problème similaire qu’aux States, ça va être chiant autrement…

Au terme de ma marche et alors que la musique avait été rebouclé pour la 11ème fois, j’arrivais au lieu de rendez-vous et… Bah y’avait pas le moindre chat à l’horizon, d’une part, mais, surtout, d’autre part, pas la moindre faille à l’horizon.

« Putain, c’est pas vraaaaaaaaai… » Râlais-je en dégainant mon téléphone portable pour vérifier « l’adresse », admettant que je m’étais trompée, casque toujours sur les oreilles. « Bah non, j’me suis pas plantée pourtant… C’est quoi ces conneries ? » soupirais-je en relevant la tête après confirmation que, non, j’étais pas plus conne que je ne le pensais.

Je regardais autour de moi. À gauche, rien du tout. À droite, rien du tout. Devant ? Rien du tout. À l’opposé ?

Pas le temps de me retourner que BAM, un putain de coup de… masse, batte de baseball ou j’en sais trop rien qui, en plus de m’enfoncer la tête droit dans le sol, tant l’fils de pute m’ayant frappé s’était pas retenu, explosa mon casque à 300 boules en mille morceaux. Pas le temps de faire quoi que ce soit qu’on m’agrippe par la tignasse, m’extrait du sol pour m’en remettre une dans l’estomac et me relâche pour m’attraper par les bras et me soulever au-dessus du sol afin de m’en mettre une nouvelle dans le ventre. Puis une autre. Puis encore une autre. Et encore, et encore, et encore, et encore. Après avoir eu l’impression d’avoir tout le système digestif qui se faisait remettre en place, on cessa de me battre gratuitement et on se mit à me parler.

Tête penchée vers le sol, j’avais les oreilles qui bourdonnaient et tout sauf la capacité à comprendre le charabiât que le mec en face de moi me chantait. J’parvins à percevoir des rires de débiles profonds avant de me prendre une sacrée droite qui me remit quelques lumières aux bons endroits. Passant d’incapable de comprendre ce qu’il me passe à vaguement sonnée, le responsable de cet attendrissement de viande gratuit m’attrapa par le menton et me souleva la tête pour me regarder dans le blanc des yeux et, cette fois-ci, j’comprenais ce que ce fils de pute m’expliquait.

« J’vais me répéter une seconde et dernière fois ma jolie, c’est bien toi qui bosse pour Lucifer ? »

« Et t’es qui, face de gland ? »

Il rit en se tournant vers ses camarades qui suivent le mouvement avant de me mettre un coup de batte dans l’estomac.

« Tu te crois en mesure de pouvoir poser des questions ici ? C’est moi qui te les pose et toi t’y réponds gentiment, okay ? Okay, bien, j’aime bien quand les gens m’écoutent et font ce que je dis. Donc, pour la dernière fois, c’est toi qui bosse pour Lucifer ? »

« Quoi… C’était pas l’autre la dernière fois que tu me posais la question ? ». Malgré la douleur, je trouvais la force de ricaner et de me foutre de sa gueule. Et, visiblement, l’amusait aussi.

Il m’afficha un grand sourire et se mit à ricaner aussi avant de s’adresser à nouveau à ses camarades, enfin, de se donner en spectacle plutôt.

« Tu vois ma grande, tu m’as l’air sympathique et j’espère sincèrement qu’on s’est trompée de cible parce que ça me ferait chier de transformer ta magnifique p’tite bouille en un tableau d’art moderne mais, vois-tu, si tu ne coopères pas et continue de jouer les fortes têtes, tu ne me laisses pas vraiment d’autres choix. ».

Il marchait de manière théâtrale, tournant dans le cercle que ses compagnons avaient formé autour de lui, moi et l’autre débile profond qui me tenait par les bras. Il avait une solide poigne de ce que je sentais, un chasseur de Rang C spécialisé dans la force physique mais rien qui ne puisse me résister. Ce joyeux gogol avec sa batte en alu devait être un rang en-dessous. Ses coups de battes piquaient mais rien d’insurmontable, j’ai eu droit à pire avec Balder. Dans un certain sens, sa démarche me rappelait celle de Lucifer c’qui me fit avoir un rictus. Perdue dans mes pensées, je l’avais un peu ignoré mais, très vite, mon attention se focalisa à nouveau sur lui.

« … ainsi, c’est dans ton meilleur intérêt de cracher le morceau. Qui sait comment ta mère réagirait en découvrant le cadavre de sa p’tite gamine chérie dans un pareil état ? »

« T’sais… C’qu’est marrant quand j’te regarde faire le mariol, c’est que tu m’fais penser à Lucifer avec ta démarche mais… niveau discours, mouais, tu vaux pas mieux que les mafiosos qu’j’ai liquidé… »

Il était à l’opposé parfait de moi quand je fis ma remarque, près du bout du cercle, en train de regarder ses gars alors qu’il m’écoutait avec grand intérêt, jonglant négligemment avec sa batte à un point où certains gugus manquèrent de se la bouffer. Cette petite pointe avait fait les connexions dans son crâne visiblement puisqu’il s’arrêtait net et se tournait vers moi, la tête légèrement penchée sur le côté.

« Répète pour voir ? »

« P’tain… en plus d’être con comme une poêle à frire, t’es sourd comme un pot… C’doit pas être facile dans ta vie. »

Ma p’tite satisfaction dans ce move, c’est qu’en plus de l’énerver et le forcer à revenir vers moi avec une sévère envie de m’enculer à sec avec du gros sel, j’avais décroché des sourires et un même un p’tit rire qui valut un regard de mort à celui qui avait eu le malheur d’avoir du bon goût par mon terrifiant agresseur. J’lui riais au nez alors qu’il m’attrapait par la tignasse avec une rage non-dissimulée.

« Écoute-moi bien connasse, tu nous as coûté assez cher comme ça alors tu vas cracher le morceau, quitte à ce que je te l’arrache à coups de battes : où se trouve Lucifer et où se trouve Balder ? »

« Ta mère t’as jamais appris à parler aux filles ? C’pas en forçant ta queue qu’ça va entrer… »

J’venais de sérieusement le mettre en rogne. Il ne prit pas la peine de ricaner ou grimacer cette fois-ci : il soupira, prit un pas de recul et prépara un grand coup de batte. Pas tout à fait ce que j’avais en tête pour me dépatouiller mais ça fera l’affaire.

Le temps qu’il prépare son coup et l’amorce, je me tournais d’un coup vers le géant qui me tenait par les bras pour lui caler un coup de pied bien vicieux dans les côtes. La surprise et ma force combinées furent suffisantes pour le faire lâcher prise et, dans l’enchaînement de mon idée, alors que je venais de reposer les pieds au sol, je me redressais vitesse VV prime pour l’attrape par le col et replonger vers le sol afin qu’il se prenne le coup de batte dans le nez qui m’était réservé. Il repartit aussi vite qu’il était arrivé dans la direction opposée à la mienne alors que son chef affichait une certaine incompréhension dans ce à quoi il venait d’assister.

Profitant de cet instant, je lui sautais dessus en lui mettant ma meilleure spear et me mise à le ruer de coups une fois au sol. Comme je m’y attendais, il était tout sauf résistant et il commença à paniquer une fois que la furie anarchiste se mise à lui refaire le visage en usant de sa propre médecine. Ses p’tits camarades, malgré leur bon goût en matière d’humour, comprirent que la situation commençait à puer du cul et abandonnèrent leurs positions de piquet pour participer à la fête. Une fois trop près de moi pour me permettre de continuer à maraver gratuitement leur chef, je me retournais sur eux.

Une mandale ici, un kick dans les bijoux de familles par-là et l’utilisation de matériel humain comme batte de baseball pour me défaire de certains de ces rigolos étaient, grosso-modo, tout ce que j’étais capable de leur mettre avant de me rendre compte que la plupart d’entre eux n’étaient même pas éveillés… Heureusement, j’avais pas frappé trop fort mais il allait falloir que je lève le pied pour pas les passer de la case « sur un lit d’hôpital » à « dans un frigo de la morgue »… Et ma bonté – enfin, si j’puis dire – me perdit. J’finis très vite submergée et, j’ai beau être une sacré salope quand il s’agit de bastonner, j’ai mes limites quant au nombre, sans arme et quand j’essaie de maintenir cette belle brochette de fils de pute en vie… Et surtout quand l’armoire à glace se remette de son coup de batte et que le propriétaire de celle-ci s’ajoutent à la fête. Un coup de batte dans les côtes, un coup poing dans le visage et, une fois au sol, le 48 du géant qui m’écrase la figure et me retient par terre. Ça m’apprendra, tiens…

« Pfiouuuuuu… eh bien ma pétasse, on peut dire que t’as un don pour me latter les couilles. Au littéral comme au figuré. J’comptais bien te laisser t’en tirer une fois l’interrogatoire fini mais on dirait que tu ne me laisses pas le choix de faire ça la manière forte, surtout après que t’aies mis inconscient une dizaine de mes gars. Je pensais qu’on serait trop de trente pour te latter la gueule mais, visiblement, mon boss n’avait pas tort. »

Visage dans la boue, tête écrasée par une godasse aussi propre que l’sol en question et plusieurs douleurs atroces dans mes bras et jambes dues aux coups de battes que j’me suis pris en représailles d’avoir fait la grande, j’avais pas vraiment moyen de bouger là… Quand j’essayais de me redresser, démontrant bien au grand gaillard que j’étais capable de lever sa jambe et tout le reste de son corps par la seule force de mes bras alors qu’il me forçait au sol, un coup de batte me remettait à ma place et je me vautrais au sol. J’m’étais mise dans une sacrée situation de merde, ouais…

« J’ai bien compris que tu parlerais pas mais j’ai au moins eu ce que je voulais : des infos. Ta loyauté de chienne envers le diable lui-même te vaudra un aller-simple pour son bureau dans les sous-sols de ce monde. T’es croyante ? Pas qu’j’en ai grand-chose à foutre mais pour s’allier à un gars comme ça alors qu’on croit en Dieu, faut être sacrément con. Mais bon, là enco- »

« Putain… mais jamais tu l’as ferme sérieux ?... »

Ma remarque, contre toute attente, ne fut pas très bien accueillie. Un coup de batte dans le coccyx me servit de réponse.

« Ferme-ta-gueule. Je te donnerais toutes les raisons de crier quand j’en aurais fini avec toi mais, pour l’heure, ferme-ta-gueule. » Je l’entendis remettre certaines de ses articulations en place avant d’interpeller l’un de ses hommes. « Francis, tiens-moi ça et qu’on m’apporte ma machette. J’vais vous la saigner à blanc, elle fera moins la maline. »

La batte fut transférée au grand gaillard au-dessus moi et l’aut’ roi des cons s’éloignait de ma position. Je l’entendais encore balbutier faire son show alors qu’il parlait à ses gars… Comment j’ai pu me faire avoir par un sac à merde aussi haut qu’ça, j’te jure…

Toujours immobile, je pliais et dépliais mes doigts afin de sentir autre chose que des fourmis dans les membres. L’attente fut longue, assez pour que j’essaie à deux reprises de me relever mais sans succès. Mes tentatives se résultèrent respectivement pas un coup de pied dans le dos à vous en broyer la cage thoracique et un coup de pied sur le crâne qui, si la diva théâtrale n’était pas intervenue, m’aurait coûté la vie puisque ma tête s’était retrouve enfoncée dans la boue avec juste une partie des cheveux qui dépassaient. Putain, j’donnerais cher pour avoir Rebellion sous le coude…

L’instant fatidique arriva donc. On m’avait à nouveau extirpé la tête du sol et, cette fois-ci, j’étais à genoux, les mains écrasées par les godasses qui empiétaient sur mon visage. La position était bien plus inconfortable mais, au moins, je savais respirer maintenant…

« Aaaaaaaaah, la voilà ! Je voulais l’avais dit qu’on l’avait emportée ! »

Car, ouais, ça faisait déjà un moment qu’il cherchait après sa machette ce con. Il s’était énervé sur l’un de ses sous-fifres qui lui assurait qu’elle avait été laissée « à la base » sous ordre d’un supérieur et avait jusqu’à lui coller une mandale qui lui valut un aller simple pour le pays des rêves. Ce truc était rouillé, cassé par endroits… Le genre de matos que tu me sors d’un Evil Within. Il continua à baratiner des conneries comme quoi, gnagnagna j’vais payer pour ce que j’ai fait, gnagnagna faut pas jouer avec les couilles du pape, etc., etc… Jusqu’à revenir à mon niveau. Il me fit relever mais, cette fois-ci, maintenir les bras dans le dos. Il me posa sa putain de machette sous la gorge mais restait stoïque.

« Même face à la mort tu ne trembles pas ? Je ne sais toujours pas à quel Dieu tu crois mais tu en as une sacrée paire pour rester de marbre alors que tu vas le rencontrer. Aller, cette fois-ci, ça m’intéresse, tu crois en qui ? »

Je lui répondis en lui crachant au visage.

Il rit.

Juste avant de m’enfoncer sa putain de machette dans les côtes, droit vers l’estomac.

Si je serrais les dents et contractais tous mes muscles en réaction au pic de douleur, lui s’amusait visiblement comme un fou… Putain, ça fait mal… Il glissa sa lame vers le centre de mon estomac avant de la retirer d’un coup sec pour se retourner à nouveau vers ses sbires et leur faire un grand one-man-show concernant certainement le pourquoi du comment leur mission était menée à bien, qu’il fallait pas jouer avec leurs couilles car sinon voilà ce qui leur arriverait ou que sais-je… mes oreilles sifflaient et mes jambes me trahirent. Ma vue se troublait et ma tête se mit à tourner. Celui qui me tenait les bras me lâchait finalement et, ainsi, je tombais d’abord à genoux en m’attrapant l’estomac, avant de tomber vers l’arrière, sur les jambes de « Francis ». Il me jeta un regard interrogateur, comme s’il essayait de savoir si j’étais encore consciente ou en vie – du moins, c’est ce que j’en déduisis par le mouvement de son corps se penchant vers moi et sa main me saluant l’air débile – mais me laissa ainsi.

Le pic de douleur s’intensifiait jusqu’à se mettre à me bruler vivement. Je rageais entre mes dents, grognais de frustration et de colère tandis que je serais ma douloureuse blessure. J’avais eu droit à bien pire, c’était quand même pas comme ça que j’allais quitter ce monde ?! Et pour finir où ? Au Helheim ? Même pas en rêve ! Au Valhöll et nulle part ailleurs ! Odin, entends mes paroles, si je viens quitter le Midgard, ça ne sera que portée par le une Valkyrie qui me mènera ultimement à toi et mes ancêtres !

Ma rage de vaincre, mon Anarchie, mon refus de finir au Helheim après avoir été abattue comme la dernière des chiennes par des chiens galeux pensant qu’on fait partie du même panier, tout ce cocktail explosif me donna la force de me relever. Francis recula d’un pas en espérant que je vacille mais je retrouvais déjà mon équilibre. Jean Mc-trou de balle se retourna vers moi, amusé et continuant à déblatérer des conneries alors que je parvenais à me redresser. Ma vue se stabilisa, mes oreilles arrêtaient de siffler, ma force revint et la douleur s’amenuisait. Une légère toux me fit cracher une gerbe de sang aux pieds de machette-man qui me souriait naïvement.

« T’es vraiment une dure à cuire, je t’accorde ça. Compte sur moi pour retenir ton nom, poulette. Francis, achève-la. »

Il claqua des doigts et se retourna, confiant. Il fit comprendre aux autres qu’ils mettaient les voiles d’un geste de la main tandis que le colosse m’attrapa par l’épaule pour me retourner et que l’on se fasse face. Il prépara son coup, mettant la batte qu’on lui avait confié à proximité de ma tête et prenant de l’élan à quelques reprises pour préparer son coup avant d’ultimement passer à l’action. Si son but était de me décoller la tête des épaules d’un coup sec pour amuser la galerie, le mien était de mettre un terme à sa carrière de baseballeur amateur.



Il porta son coup mais, d’un geste, j’arrêtais son mouvement en attrapant l’un de ses poignets pourtant aussi grands que la largeur de ma main. Le claquement ne sonnant pas comme ce à quoi il s’attendait, la diva s’arrêta dans sa marche et se tourna vers moi, tout ça pour mieux constater que j’avais tordu le poignet de ce pauvre Francis dans un craquement aussi soudain que violent le tout pour m’emparer de sa batte. À mon tour, je pris un peu d’élan avant de pousser un hurlement de rage bestiale et le frapper en plein dans la mâchoire.

Le ciel se fendit, la foudre tonna et frappa de plein fouet ma pauvre victime qui, suite à la puissance du coup, vola dans le décor et sur plusieurs mètres. Son visage se décomposa lorsque ses yeux, après avoir essayé d’évaluer l’ampleur des dégâts de Gislaine la fidèle, se posèrent dans les miens, blancs, vibrant d’une énergie colossale rougeâtre. Le pauvre Francis avait la chance de s’être endormis sur le coup, un joli ko technique qui lui permettrait de ne pas avoir à trop pleurer et geindre ce qui m’aurait encore plus tapé sur le système. Entendre les gémissements craintifs des gars en train de se chier dessus derrière moi était déjà bien suffisant…

Je me tournais lentement et plongeais mon regard sur ce magnifique attroupement de fils de pute. Pas un seul n’osait bouger de peur de subir le même sort, pas même ce beau et joyeux « chef » qui, à présent, se chiait autant dessus que tous les autres de ses hommes.

Il était terrorisé, à un point où je ne comprenais même pas ce qu’il me disait tant il était incapable d’articuler. Il ne bougeait pas, enfin, pas beaucoup, et implorait ma pitié en se vautrant lamentablement comme une merde après avoir glissé dans une flaque de boue. Évidemment, je n’avais que faire de ses plaintes et supplications. Arrivée à son niveau, je lui souris.

« C’est drôle comment les rôles s’inversent, tu trouves pas ? »

Je ne lui laissais pas le temps de me répondre qu’un grand coup de batte rencontra son visage. Il tomba KO sur le coup, lui aussi, et s’étala de tout son joug sur le sol. Je lançais un regard noir à tous les sbires restants. Certains eurent le courage de s’y mettre à plusieurs sur moi et me chargèrent dans un ultime baroud d’honneur qui se termina en un massacre de cons à grands coups de batte. Finalement, les plus intelligents comprirent que c’était peine perdue et commencèrent à récupérer leurs blessés vers les diverses camionnettes qui avaient amenés tout ce beau monde jusqu’à moi. Ils durent s’y mettre à plusieurs pour déplacer le gros cul d’Francis mais, sous mon regard aussi presseur qu’oppressant, ils finirent par tous mettre les voiles hors d’ici, ne me laissant que la batte, la machette, le téléphone portable de c’t’autre enculé, une chiée de plaque d’immatriculations italiennes et une nouvelle rune gravée dans le dos qui en disait long sur moi :